YEMEN LA GUERRE OUBLIEE
Président de la République arabe yéménite (nord) à partir de 1978, puis du Yémen réunifié depuis 1990, l'inamovible président Ali AbdallahSaleh accuse ces rebelles de vouloir renverser son régime pour rétablir l'imamat zaïdite, aboli en 1962 à Sanaa, et d'être manipulés par l'Iran. Même s'ils sacrifient volontiers à une rhétorique antioccidentale, les houthistes, du nom d'Hussein Al-Houthi, figure de proue du soulèvement, tué en 2004, dénient toute instrumentalisation de leur cause par une puissance étrangère et insistent au contraire sur l'aide que le royaume saoudien apporterait au président.
Les houthistes assurent défendre une identité menacée selon eux à la fois par la politique du pouvoir central, qui maintiendrait leur région dans le sous-développement, et par la poussée d'un fondamentalisme sunnite à l'égard duquel Sanaa entretient souvent l'ambiguïté.
Au cours des derniers mois, le président Saleh a multiplié sur ce front les annonces de trêves et les offensives destinées à étouffer la rébellion une fois pour toutes, même si les multiples campagnes conduites dans un milieu souvent propice à la guérilla font douter de la pertinence d'une solution militaire. Au contraire, ce conflit semble se nourrir d'une dynamique qui lui est propre : les ravages de la guerre, l'émergence de chefs locaux et les promesses de reconstruction non suivies d'effet ou torpillées par la corruption alimentant la rébellion plus sûrement que ses mots d'ordre initiaux.
Il semble pour l'instant que le caractère très identitaire du soulèvement interdit une jonction tactique avec le Sud, qui se sent aussi délaissé, voire "pillé" ou "colonisé", par le Nord, si on en croit les critiques sudistes les plus virulents vis-à-vis du pouvoir central. Une alliance avec les groupuscules djihadistes se revendiquant d'Al-Qaida qui perdurent au Yémen semble tout aussi exclue, compte tenu de la fracture irréfragable entre sunnisme et chiisme.
Le désintérêt occidental vis-à-vis de cette guerre civile yéménite n'en est pas moins dommageable, parce qu'elle entretient dans la péninsule Arabique un foyer de déstabilisation dont le potentiel ne saurait être sous-estimé. Si on y ajoute le pandémonium somalien sur la Corne de l'Afrique, on prend la mesure de la fragilité de cette zone où se croisent pourtant nombre de routes stratégiques.
Source :le monde